Science et éthique.

Comment nier le progrès devant des évidences factuelles ?

Lorsque le roi soleil avait mal aux dents dans son palais glacial, durant les hivers, il ne pouvait pas même recourir à un aspirine et ses médecins lui entaillaient les jambes à la fin de sa vie pour feindre de remédier à ses gangrènes.
Le plus modeste de nos contemporains est mieux préservé du froid et des infections que les plus puissants monarques de la terre des 17ème et 18ème siècles.
Nul ne peut ni réfuter, ni condamner ces avancées qui font reculer la souffrance, la mort en même temps que l’ignorance, la crédulité, l’obscurantisme d’un passé si récent.

Aujourd’hui, la science offre d’autres perspectives et, depuis un demi-siècle, les craintes qu’elle suscite le disputent aux espoirs qui accompagnent ses conquêtes.
Pourquoi cette appréhension à la mode ?

D’abord, parce que la science a déçu. Durant la phase des grandes découvertes,la science promettait tout. Or, par-delà ses avancées, reste que la souffrance, l’effroi et la mort ne sont pas vaincus. Ainsi, la médecine gagne des batailles mais  perd toujours la guerre puisque tout individu meurt, ce qui signe la victoire finale de la maladie sur la thérapeutique.
Et puis, instrumentalisée par la technique au service des profits, la science se pervertit par ce qui pourrit tout : l’argent.

Par ailleurs, après la maîtrise matérielle, la science s’achemine vers le déchiffrage et la maîtrise du vivant, de la cellule, de son vieillissement, de ses erreurs de codage génétique.
Après avoir changé son environnement, l’homme pourrait bien demain changer l’homme lui-même.

D’aucuns s’en réjouissent. D’autres s’effraient devant ce pouvoir prométhéen.

Les optimistes y voient la fin des peurs, des douleurs, de l’angoisse existentielle.
Les pessimistes pensent que l’argent qui corrompt tout viciera toujours  la société et détournera la science d’une finalité altruiste, bienfaisante pour la mettre au service du vil profit des entreprises privées (privées de quoi ? de scrupules).

Or, ce débat ne concerne pas la science qui éclaire mais l’usage que la société en fait.
Celui qui inventa le feu, inventa le bûcher .
La polémique actuelle autour des organismes génétiquement modifiés illustre ce détournement du débat de fond.

Pour moi, la question n’est nullement de savoir si la consommation de maïs transgéniques favorise ou non l’apparition de cancers chez le rat ou le bipède.
Peut-être que le poison mis au point par l’homme se retourne contre lui.
Peut-être n’en est-il rien et cela ne modifie absolument pas le jugement que l’on doit porter, d’un point de vue essentiel, c’est-à-dire éthique.
A quoi servent les OGM mis sur le Marché par les firmes semencières ?
Les uns contiennent des molécules insecticides intégrés à la plante et d’autres permettent aux cultures de supporter davantage d’herbicide spécifique commercialisé par la même firme.
Tous ces OGM n’ont qu’un but : rendre les cultures plus intensives encore et ce au détriment de la biodiversité.
Cela est radicalement inacceptable.
Donc, quand bien même, les firmes et leurs agents rémunérés démontreraient l’innocuité de leur matériel génétique pour la petite santé humaine, reste que ces végétaux sont  fondamentalement des agressions intolérables contre le vivant.
Ce qui se joue ici est deux conceptions  irréductiblement inconciliables de l’espace terrestre.
Pour les uns, l’humanité destinée à croître et multiplier sans cesse doit s’alimenter au détriment de toutes les autres formes de vies qui à terme sont toutes condamnées à disparaître, si elles ne profitent pas directement à l’espèce élue.
Pour ces productivistes, il faut des cultures intensives partout et sans aucun parasite végétal ou animal. La terre doit devenir un immense champ de production exempt de vies sauvages.
Les insectes ravagent les récoltes. Les oiseaux préemptent des graines. Les loups mangent des moutons. Les pigeons souillent les monuments. Les cormorans concurrencent les pêcheurs à la ligne. Tout doit s’effacer au nom de la rentabilité maximale.

Nous ne voulons pas de cet enfer productiviste.
Nous voulons des oiseaux, des mammifères, des reptiles, des amphibiens donc des insectes et des fleurs sauvages.
Si nous ne posons pas le problème en ces termes éthiques, le débat est biaisé et demain des intérêts très privés « de scrupules » nous démontreront que leur technoscience est bonne pour le consommateur à l’engrais dans le super-marché mondialisé.

Je consomme « bio », non pas pour vivre plus longtemps car je n’ignore pas qu’au siècle passé tout le monde mangeait « bio » et que les gens mouraient massivement de phtisie, de typhoïde et de cancers qui n’ont pas attendu les molécules de l’agrochimie pour torturer les hommes.
Je mange « bio » pour la nature, pour que les espaces ruraux ne deviennent pas des déserts de vies.
Ce n’est pas la science qui nous menace mais l’usage pervers qu’en font les affairistes et les anthropocentristes.
Alors, aimons le feu qui réchauffe  et condamnons le bûcher.
Ne confondons pas une science qui sauve et un système économique, social, politique, moral exécrable, car négateur des droits du vivant.
Sachons distinguer le génie et la générosité qui font l’homme en éradiquant le guerrier, le génocideur, le chasseur, l’exploiteur, manifestation de la barbarie.
Vers quel horizon marche l’humanité ?
Science et éthique permettront-elles l’édification d’une société réconciliée avec le vivant ou la puissance de nuisance du grand massacreur, en s’accroissant sans cesse, permettra-t-elle sa salutaire auto-destruction ?
Deux processus sont à l’œuvre : une élévation de la conscience écologique globale et une accélération de la quête du profit.
Du résultat de cette course dépendra le devenir de l’homme qui, jusqu’à ce jour, fut incontestablement le plus féroce nuisible que la terre a généré.


Gérard  CHAROLLOIS
CONVENTION VIE  ET NATURE
MOUVEMENT D’ECOLOGIE ETHIQUE ET RADICALE
POUR LE RESPECT DES ÊTRES VIVANTS ET DES EQUILIBRES NATURELS

Ajouter un Commentaire


--
--
---/---
.../...

 

 

 

--
---

---/---

---/---

 

--
--

---/---

---/---