Les abattoirs cynégétiques reprennent du service

 


Par David Joly - Vice-Président de la Convention Vie et Nature


Alors que l’ouverture générale de la mort-loisir approche pour cette année 2015, synonyme d’un nouveau carnage à venir d’environ 30 millions d’animaux (25 millions d’oiseaux et 5 millions de mammifères), il est de bon ton de préparer le terrain.

Chez les journaleux d’abord qui, en bons valets des fédérations de chasse, commencent déjà à nous servir leurs traditionnels articles mensongers (l’éternel 1,3 million de chasseurs français est ressorti des archives pour la dixième année consécutive, alors que depuis ce nombre est quasiment divisé par deux), fallacieux et dithyrambiques envers une activité consistant à donner, pour le plaisir, la mort de façon plus ou moins brève à un animal doté de sensibilité.

Mais aussi, et en premier lieu, chez les fines gâchettes qui, privés pour la plupart de leur sadique loisir depuis plusieurs mois, vont ainsi s’assurer de pouvoir assouvir leurs pulsions thanatophiles.

Car quoi de plus frustrant que de partir le matin avec le dessein d’ôter la vie et revenir le soir sans y être arrivé, aucune victime potentielle n’ayant pointé le bout de son nez ? C’est un permis de tuer qui est souscrit, pas un permis de flâner ou d’admirer la flore locale.

Et pourquoi se contenter d’une seule victime là où l’on peut réaliser une véritable hécatombe ? La rencontre fortuite, il faut parfois la provoquer, même de la façon la plus grotesque et la plus ignoble qui soit.

 Application sur le terrain : qui est parti cet été quelques jours en vacances du côté de Bacilly, charmant petit village de la Manche, proche de la baie du Mont Saint-Michel, a pu, au cours d’une promenade campagnarde, admirer plusieurs exemplaires de ce panneau, planté le long de la route principale :

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Qu’est-ce donc que ce bricolage maison bâclé pour inciter l’automobiliste à une extrême prudence vis-à-vis d’une supposée traversée de faisans ?

Apparemment, quelques dizaines de mètres plus loin, il y aurait une réserve :

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Une réserve naturelle, à la biodiversité riche, où des faisans sauvages auraient  élu domicile ?

Rien de tout cela. Il s’agit de la réserve n° 122 de la FCM, autrement dit la fédération de chasse de la Manche. Et dans le monde cynégétique, une réserve, ça ressemble à ça :

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Soit un espace d’un demi-hectare complètement aseptisé. La seule chose qui y ait poussé de façon ostentatoire et bien sûr artificielle, c’est une espèce de bicoque faite de bric et de broc, à l’intérieur de laquelle ont élu domicile orties et ronces :

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Alors, vous voyez où je veux en venir ? La chasse, dans la Manche comme partout ailleurs, c’est avant tout du lâcher d’animaux destinés à alimenter le stand de tirs de frustrés en manque de sensation. Les 2/3 des animaux tués proviennent d’élevages, appartenant la plupart du temps à des officiels du monde cynégétique, qui s’assurent ainsi un bas de laine confortable, essentiellement sur le dos du contribuable qui finance toute cette mascarade par l’intermédiaire de la Politique agricole commune et des subventions octroyées à tous les niveaux du millefeuille politique français (Parlement, régions, départements, municipalités).

Dans le cas présent, nos bons gestionnaires de la nature n’auront qu’à s’installer dans leur baraquement de fortune, bien dissimulés, et attendre que les rabatteurs de service ratissent le champ voisin pour effrayer les faisans lâchés quelques instants auparavant, les incitant ainsi à traverser de part en part la « réserve » pour servir de chair à fusil. Les rares spécimens qui réchapperont de cette boucherie (s’il y en a) mourront quelques temps plus tard, incapables de se nourrir par eux-mêmes dans un environnement qui leur est totalement inconnu. En ayant transmis bien sûr, à la faune sauvage locale de plus en plus rare, les potentiels parasites et maladies qu’ils ont développés au cours de leur courte vie d’élevage.

 Pas besoin de bouger, il suffit d’appuyer sur la gâchette le moment venu : si ça, ce n’est pas du sport…

Le tout à moins de 50 mètres des plus proches habitations. Et alors ? Où est le problème ?

 Le problème, il est bien simple : tant éthiquement qu’écologiquement, la chasse est un véritable cancer pour la nature.

 DJ.

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