Le droit de vivre dans la dignité.

Nos contemporains s’agitent pour de bien étranges questions.
Les uns, héritiers des obscurantismes millénaires, brandissent le respect de la vie pour s’opposer aux autres, militants du « droit de mourir dans la dignité ».
Dans cette bataille décalée, je ne me rangerai dans aucun de ces deux camps pour formuler une pensée iconoclaste.
Les premiers, ceux des traditions, pensent que la souffrance, don des dieux, rachète les fautes des Hommes qui doivent sans cesse expier une culpabilité diffuse et perpétuelle.
Plus l’individu souffrira et plus ses fautes seront effacées. Le monde doit n’être qu’un vaste champ de pleurs, de cris, de sacrifices, de renoncements et chacun est coupable et doit réparer pour atteindre à la félicité dans l’arrière-monde, celui d’après la mort.
Puisque les dieux le veulent, il faut respecter leur verdict et souffrir son agonie jusqu’au bout.
Ces esprits religieux condamnent l’euthanasie « bonne mort », fuite devant l’épreuve, que leurs antagonistes revendiquent avec gourmandise.
Pour les seconds, il faut « lâcher la barre », « renoncer à vivre » à peine a-t-on appris à le faire.
Ils parlent de « mourir dans la dignité » ce qui suppose que d’autres meurent dans l’indignité.
Bien sûr, les premiers, rescapés du Moyen-Age, sont grotesques avec leur valeur rédemptrice de la souffrance.
La souffrance ne rachète rien et d’ailleurs il n’y a rien à racheter.
Cette culpabilité permanente est ridicule et ce qui est mauvais n’ajoute rien de bon aux humains et à leur planète.
La douleur est une ennemie qu’il faut combattre, extirper, anéantir systématiquement qu’elle affecte un humain ou un frère animal.
Donc, je pourrais me rallier aux seconds, ceux qu’excite la perspective de tuer les vieillards sénescents, les malades incurables, ceux qui souffrent tellement et peut-être un peu moins.
Je m’y refuse car, pour moi, il n’y a pas de « bonne mort ».
Avec le regretté CAVANNA, je dirai que la mort est une horreur révoltante, répugnante, il dirait : une « salope dégueulasse ».
Alors, me dira-t-on, que proposez-vous puisque vous condamnez à la fois la souffrance et la mort ?
Les deux sont nos ennemies et aux amateurs de trépas (pour les autres), je ferai observer que si les médecins du 17ème siècle torturaient leurs patients y compris le roi soleil soumis à des traitements d’une cruauté inouïe, notre médecine contemporaine avec ses biopsies, ses ponctions, ses thérapeutiques invasives demeurent pourvoyeuse de bien des douleurs physiques propices à satisfaire les « religieux » en quête de rédemption.
Pour la médecine d’aujourd’hui qui sera à celle de demain ce que fut la médecine de MOLIERE pour nous, le soulagement du patient s’entend de l’allègement de son agonie ce qui est vertueux, mais bien insuffisant.
Pour être clair, je n’aime pas l’euthanasie, n’aimant pas la mort, mais j’accepte volontiers le suicide assisté de celui qui en toute conscience, hors dépression pathologique, opte pour l’arrêt de sa vie.
La différence tient à l’expression de la volonté.
Que certains aspirent à mourir, les regarde, mais je connais bien davantage de personnes qui meurent sans l’avoir voulu.
Nos amis médecins s’extasient dans leurs livres et articles sur les « progrès de leur science », progrès indéniables et positifs.
Oui, la biomédecine triomphe de pathologies naguère fatales.
Reste que la médecine contemporaine perd toujours, en bout de course, sa guerre contre la maladie, puisqu’il n’advient à personne de ne pas mourir.
Par ailleurs, les soins demeurent souvent cruels.
Aussi, je proclame le droit de chacun à vivre dans la dignité et l’ataraxie, c’est-à-dire l’absence de troubles, en bonne santé, c’est-à-dire dans le silence de ses organes.
Allons :
Que ceux qui célèbrent la souffrance et la mort digne ou non laissent vivre les autres !
Je n’entends pas les priver de leurs goûts morbides.
Face aux maux, nous conservons un droit à l’indignation et au refus.

Gérard CHAROLLOIS


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