Jean MOULIN ou Maurice PAPON : pour un état impartial.

Il résulte d’informations circonstanciées publiées par la presse libre que Madame Marie LAJUS, préfète d’Indre et Loire, a été démise de ses fonctions par le gouvernement le 7 décembre dernier.
Sa faute -qui est à son honneur- serait d’avoir fait respecter l’état de droit en refusant à des « élus locaux » la destruction d’un site naturel pour l’implantation d’un ensemble immobilier, en zone inconstructible que ces politiciens convoitaient.
Mais le quinquennat est écologiste ou n’est pas !
Actuellement, en Périgord, le président du département veut passionnément une nouvelle route dans la vallée de la Dordogne, et son projet validé par un ancien préfet a été censuré par le conseil d’état, la cour administrative d’appel ordonnant même la démolition sous astreinte des ouvrages hâtivement réalisés.
Refusant de s’incliner devant l’autorité de chose jugée, l’élu local organise force lobbying et manifestations pour que l’état viole l’autorité de chose jugée s’attachant aux arrêts des juridictions.
Il fulmine contre les juges qui l’entravent dans sa volonté absolue de tracer sa déviation.
Il dépose un dossier en vue d’obtenir du préfet l’autorisation de poursuivre un chantier dont les juridictions ont ordonné la démolition.
Nous attendons la décision de l’état, donc des ministères, en cette affaire exemplaire d’un mal français.
Si un ministre, un préfet ou toute autre autorité publique prend un arrêté illégal, le juge administratif est là pour l’annuler.
Par-delà tel ou tel dossier ponctuel, regardons vers les sommets et examinons la situation institutionnelle du pays.

La France est partiellement un état de droit, ce qui chagrine fort la classe politique et le pouvoir exécutif qui aimeraient bien s’affranchir des entraves juridiques pour assouvir les appétits gloutons des promoteurs, déménageurs de la Nature, massacreurs de sites et dévastateurs d’espaces boisés.
Pour une fraction de la classe politique, « que la Nature aille se faire protéger sous les tropiques ou aux pôles, mais que rien ne perturbe la marée du béton et du bitume qui doit tout submerger au nom des petits intérêts très privés ».
Amusons le bon peuple avec les proclamations vertueuses sur l’écologie, le climat, la qualité de la vie, la sauvegarde de la biodiversité, mais l’unique objectif de certains politiques tient à l’enrichissement privé de quelques-uns. « L’environnement, ça commence à bien faire » avoua l’un d’entre eux.
L’état voudrait il des préfets dociles qui servent les méga-bassines, les promoteurs, couvrant les collusions entre les spéculateurs et les « élus locaux » ?
Hier encore, il était de notoriété publique que la vie politique se finançait via les grands travaux et les petits pots-de-vin, les valises de billets et il était d’usage de parler de « fiefs électoraux » où de petits marquis cumulaient les mandats électifs.
Une féodalité se constituait en marge des normes républicaines et à l’ombre des lois et des tolérances, des silences et des complicités.
Suite à certains scandales retentissants, grâce à des juges courageux et des journalistes honnêtes, des lois encore insuffisantes intervinrent pour « moraliser » la vie publique en contrôlant les dépenses électorales, en surveillant les enrichissements personnels des politiques au cours de leurs mandats, mais l’esprit féodal demeure et d’aucuns déplorent que la république des juges fasse échec à la république des copains et que le cumul des mandats électifs ne soit plus possible, comme au bon vieux temps des abus et du clientélisme local.
Or, il n’y a de démocratie mature et honnête que dans la séparation des pouvoirs et dans leurs contrôles réciproques : le législateur fait la loi, le gouvernement l’exécute, le juge dit le droit et tranche les litiges et tout ceci dans un esprit d’impartialité.
Hors de cette norme, il n’y a pas de démocratie authentique.
Rappelons aux élus, (si souvent bien mal élus par une minorité de citoyens) que leurs mandats leur assignent des prérogatives institutionnellement définies et limitées, mais que le suffrage ne confère pas une onction divine attribuant des privilèges exorbitants.
Les élus sont soumis à l’état de droit.
Ils ne doivent pas user de leurs fonctions pour enrichir un gendre ou un copain, renvoyer un ascenseur en offrant un lotissement, une voie publique à une activité privée au détriment de la biodiversité et de la qualité de la vie des citoyens ordinaires non membres du clan et non clients soumis du décideur .
Dans une société mercantile, cultivant la cupidité, la corruption banalisée reste le mal endémique du pays.
Honneur aux élus, aux préfets, aux magistrats qui servent l’état de droit et la probité, parfois à leur détriment de carrière et qui résistent aux petits arrangements entre amis.
C’est une question de caractère.
Tout homme a un jour à choisir entre être Jean MOULIN ou Maurice PAPON.
Citoyens, réveillez vous !
N’acceptez pas la corruption et exigez un état impartial et honnête.
Je ne connais pas les tenants et aboutissants de l’affaire qui valut à Madame Marie LAJUS, préfète d’Indre et Loire, une révocation, mais ce que j’en lis me paraît inquiétant et je lui exprime mon respect pour son courage, sa probité, sa capacité à refuser la loi de l’argent qui putréfie tout.
Par tempérament, beaucoup s’inclinent et préfèrent une injustice à un désordre.
Ils souffrent du syndrome de PONCE PILATE et qualifieront volontiers de « terroristes » ceux qui sont des « résistants ».
L’Histoire juge et rend hommage à ceux qui un jour, contre leurs intérêts personnels, surent dire : « NON ».

Gérard CHAROLLOIS

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