La reconnaissance du statut pervers de la chasse

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par David Joly - Vice-Président de la Convention Vie et Nature


Lundi 16 mars 2015, en soirée, s’est déroulé un grand moment d’anthologie de la vie politique française, malheureusement passé inaperçu aux yeux de tous.
Un jour historique marqué par la reconnaissance officielle à l’Assemblée nationale, d’un statut.
Non pas le statut d’être sensible pour les animaux sauvages, comme le proposaient Geneviève Gaillard et Laurence Abeille. En effet, ces deux députées étaient à l’origine d’amendements rattachés au projet de loi sur la biodiversité, amendements qui avaient pour objectif que les animaux sauvages dotés de sensibilité vivant à l'état de liberté et n'appartenant pas aux espèces protégées ne puissent être intentionnellement blessés, tués, capturés, ou, qu'ils soient vivants ou morts, transportés, colportés, vendus, ou achetés, sauf lors des activités régies par les règlements propres à la chasse, aux pêches, à la recherche scientifique ainsi qu'à la protection de la santé publique ou vétérinaire et de la sécurité publique.

Des amendements totalement inoffensifs donc pour les activités cynégétiques puisque ces dernières y sont clairement tolérées.
Mais le lobby chasse qui  y voyait un début de risque de remise en cause de la mort-loisir, a toussoté en faisant les gros yeux, et alors ses traditionnels esclaves en poste au Parlement et au gouvernement sont venus à sa rescousse pour faire rejeter ce millimètre d’avancée dans la civilisation.
Ce dramatique épisode, mettant une nouvelle fois en lumière le degré d’indépendance et d’éthique de la classe politique française, a généré cependant deux instants mémorables.

Le premier a consacré toute l’incompétence et l’absence de stature de la ministre actuelle de l’Écologie. Ségolène Royal est venue prêter main forte aux combattants de l’empathie en avançant les arguments suivants :

1-     les amendements proposés représentent un cavalier législatif sans rapport aucun avec la loi sur la biodiversité auxquels ils sont rattachés ;

2-     ils pourraient être à l’origine de risques de poursuites juridiques dans le cas, par exemple, de la lutte contre les ragondins pour protéger le Marais poitevin.

En résumé, il n’existe, pour la personnalité politique en charge actuellement de l’écologie, aucun lien entre les animaux sauvages et la biodiversité. Il fallait oser !
Si vous ouvrez le Larousse, vous y apprendrez que la biodiversité est « la diversité des espèces vivantes et de leurs caractères génétiques ».
Donc, pour Ségolène Royal, un lièvre, un chevreuil, un sanglier, une tourterelle… ne sont pas les représentants d'une espèce vivante.
Ne lui en voulons pas trop, son expérience de la nature se limitant au marais Poitevin, la seule espèce vivante sauvage recensée en France étant, dans son esprit, le ragondin.
Étonnez-vous qu’après cela la faune sauvage soit laissée à la disposition de pervers avides de mort et de cruauté.
En effet, c’est le deuxième instant mémorable de cette soirée qui a vu plusieurs députés reconnaître, de par leur vote et leur argumentaire, le statut pervers de la chasse, seul statut adopté donc.
Pour rejeter un autre projet de loi qui prévoyait d’étendre aux animaux sauvages la répression pénale en cas d'acte de cruauté, de sévices graves ou de nature sexuelle, ces députés ont mis en avant l’utilisation qui pourrait être faite de cette nouvelle disposition contre différents modes de chasse ou de capture.
À quels modes de chasse ou de capture pensaient-ils ? La chasse à courre ? Le déterrage ? La tendelle ? Le gluau ?
Aucun d’entre eux ne l’a précisé. Mais peu importe, s’ils estimaient que ce projet de loi de répression pénale menaçait ces activités, alors c’est qu’ils sont intimement persuadés que les modes de chasse ou de capture qu’ils ont défendu relèvent clairement de l’acte de cruauté et du sévice grave, leurs pratiquants étant alors, par définition, de bien grands pervers.
À moins que ces défenseurs des traditions rurales ne pensaient au troisième volet du projet de loi, à savoir l’acte de nature sexuelle.
Bien sûr que non, comme chacun sait, le monde de la chasse n’est constitué que de gens totalement équilibrés d’un point de vue psychique…

DJ.