Cruauté envers les animaux : deux poids deux mesures.

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Par Armand Farrachi - Ecrivain - co-fondateur de la Convention Vie et Nature

Les individus qui se livrent à actuellement à des actes de cruauté sur des chevaux  provoquent  une  indignation  unanime.  Tout  le  monde  souhaite évidemment  que  les  auteurs  de  ces  actes  soient  mis  le  plus  tôt  possible  hors d’état  de  nuire  (ce  qui  n’est  d’ailleurs  nullement  assuré  par  les  deux  ans  de prison  qu’ils  encourent  théoriquement).  Le  ministre  de  l’agriculture  parle  à juste titre d’une «cruauté inouie». En revanche, c’est avec la bénédiction du pouvoir que les veneurs continuent de promouvoir à grands frais la chasse à courre,  qui  consiste,  rappelons-le,  à  faire  poursuivre  un  cerf   par  des  meutes de  chiens  jusqu’à  l’épuisement  puis  à  le  noyer  ou  à  l’égorger  («servir», comme  ils  disent),  à  la  dague.  Les  veneurs  risquent-ils  deux  ans  de  prison  ? Non, ce sont leurs opposants qu’on poursuit ! Les chasseurs eux-mêmes, qui s’amusent  à  tirer  à  coups  de  fusil  sur  les  animaux  qu’ils  rencontrent,  ou  qui engluent  les  oiseaux,  sont  fermement  défendus  par  le  pouvoir.  Avec  quelle cohérence ?

S’agit-il seulement de défendre le domestique contre le sauvage ?  Nullement, car les taureaux dits «de combat» sont élevés exclusivement  pour  que  les  toreros  et  ceux  qui  les  financent  puissent  les torturer   en   leur   enfonçant   des   banderilles   dans   l’échine   puis   en   les transperçant avec une épée, avant de leur couper, eux aussi, une oreille. Sont-ils  menacés  de  deux  ans  de  prison  ?  Non,  ce  sont  leurs  opposants  qu’on fustige, parce qu’ils gênent l’accès aux arènes. Où est la vraie différence entre les bourreaux de chevaux et les bourreaux de cerfs ou de taureaux ? Torturer un taureau sur son pré serait un crime, mais dans une arène, c’est un exploit !Poignarder  un  animal  innocent,  n’est-ce  pas  dans  tous  les  cas  faire  preuve d’un  criminel  manque  de  compassion  ?  Est-ce  cela  qu’il  faut  encourager  ? Pourquoi  ne  parle-t-on  plus  alors  de  «cruauté  inouïe»  mais  de  «tradition longue  et  ininterrompue»  ?    Suffirait-il  de  mutiler  longtemps  les  chevaux pour mériter également le statut de «tradition» ?  La  majorité  de  la  population  pense  que  ceux  qui  se  livrent  à  des cruautés  envers  les  animaux,  quels  qu’ils  soient  et  sous  quelque  prétexte  que ce  soit,  méritent  un  châtiment,  et  nom  des  subventions  ni  des  médailles.  Le gouvernement qui l’ignore ne peut-être que lâche ou aveugle. Et pourquoi pas les deux ?

Armand Farrachi* (*dernier titre paru : Le Triomphe de la bêtise (Actes Sud)