La Révolution sans violence.

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L’Histoire de l’humanité s’est faite à coups d’épées.
Aux noms de la liberté, de l’égalité, de la lutte des classes, de l’émancipation des uns opprimés par les autres, des hommes dressèrent des échafauds, bâtirent des camps, massacrèrent d’innombrables réfractaires ou présumés tels.
Pour combattre les sociétés féodales, puis capitalistes, sociétés fondées sur des valeurs de mort, les concepteurs d’ordres nouveaux opposèrent des valeurs de mort.
Notre temps pourrait accéder à une rupture inédite, plus radicale que les précédentes, car sans  guillotines, sans goulags, sans vainqueurs qui épurent, sans la moindre violence contre les personnes.
Une Révolution : Pour quoi faire ?
Pour que les concepts de « concurrence », de « compétition », « d’exploitation », de « domination », soient reconnus comme ce qu’ils sont : des perversions.
Pour que la solidarité, la compassion, la raison triomphent de l’obsession de l’accaparement, et des stupides superstitions fondements des communautarismes criminogènes.
Le socle de cette Révolution réside dans le rapport que l’humain entretient avec la nature et les animaux.
Observons que la contestation des actes de cruauté envers les animaux ne s’accompagne d’aucune brutalité à l’encontre des personnes et que, fut-elle radicale en sa pensée, cette remise en cause de la chasse, de la tauromachie, de l’élevage, de la vivisection ne génère aucune violence, ce que déplorent évidemment les lobbies de la mort qui y trouveraient l’occasion d’éliminer leurs adversaires idéologiques.
Ainsi, nous vîmes, en France, des groupes de militants s’interposer contre des chasses à courre. Les autorités conservatrices auraient volontiers sanctionné le moindre écart commis par les « perturbateurs » s’ils avaient bien voulu perpétrer une quelconque infraction.
Le lobby chasse dut obtenir de ses valets dans l’appareil d’Etat un décret du 3 juin 2010 réprimant « l’entrave à la chasse », faute d’atteindre autrement les trublions.
Une certaine presse régionale, persuadée de posséder un lectorat débile, chante les louanges des corridas et doit relater les incidents accompagnant désormais ces spectacles, en renvoyant dos à dos les amateurs de torture et les défenseurs des taureaux, en feignant de ne  pas savoir que les blessés sont toujours dans le même camp.
Il n’y a bien sûr pas d’homogénéité dans les mouvements planétaires de défense de l’écologie et des animaux mais se dégage de cet ensemble une impression forte et claire.
Si toutes les doctrines, toutes les vieilles idéologies croulent sous les masses de cadavres qu’elles générèrent, l’écologie est la seule pensée exempte de sang sur les mains.
Ce fait ne résulte pas que de sa jeunesse mais de la racine même de cette pensée neuve : au centre des valeurs il y a le vivant.
Nous sommes en présence d’une double rupture :
- rupture avec les valeurs de mort de la société de la concurrence, de la compétition, du profit, de l’accaparement, du mépris du vivant ;
- rupture avec le concept traditionnel de Révolution impliquant violence, épuration, châtiment des traîtres et renégats, dénonciation des suspects.
Les échecs instruisent ceux qui veulent bien recourir à la raison pour appréhender leur vie.
Nos grands frères ou, pour les plus jeunes, nos pères, rêvaient fébrilement, dans la décennie 1960, de changer le monde et ils ont laissé le monde les changer en inconsistants.
Aujourd’hui comme hier trop de clercs trahissent l’intelligence en célébrant des religions pour les uns, un système économique pour tous, qu’ils brûlaient dans leur ardente jeunesse soixanthuitarde.
Nous  apprenons, grâce à leur déchéance, que pour changer le monde, il faut nous changer nous-mêmes et refuser les valeurs de mort pour vivre les valeurs de vie.
N’attendons pas que l’Etat abolisse la chasse, la corrida, la concurrence, la compétition, le profit, mais refusons radicalement ces faits sociaux et ces tares, comme nous récusons le sacrifice, la souffrance rédemptrice, la célébration du malheur érigé en vertu.
Nous ne sommes pas, face à ces tares, dans une démarche molle, réformatrice, résignée, mais dans un rejet absolu de tout ce qui tue, pollue, inflige souffrance et frustration.
Personnellement, j’ai l’immense satisfaction, à mon âge, de savoir que le système ne me récupèrera pas.
Tant pîs, pour la décoration !
La Révolution des consciences : c’est maintenant.

Gérard CHAROLLOIS