Éthique et procréation

Depuis 1988, la France édicte des lois dites bioéthiques révisables périodiquement et présentement tous les sept ans.
Cette année, en prévision d’une révision de la dernière loi remontant à 2011, des débats seront déconcentrés dans les régions sous l’égide du comité national d’éthique.
Concrètement, ces lois traitent du corps humain, de la procréation, de la mort et de la recherche médicale.
Dès l’abord, observons qu’elles sont anthropocentriques, aucune disposition n’intéressant les êtres vivants pris dans leur vaste communauté formant la biosphère.
Je vous propose quelques réflexions pour alimenter le débat auquel vous serez peut-être appelés à participer.
Cette semaine, examinons le commencement de la vie et la question de la procréation dont les conditions sont totalement subverties par la science contemporaine capable de déterminer par analyses génétiques la filiation de manière certaine et capable de « fabriquer » un embryon à partir de « matériel biologique » réparé.
Tout le monde connaît les « bébés éprouvettes », la fécondation in vitro, le don de gamètes à des couples stériles.
De nouvelles innovations complexifient les origines d’un enfant ainsi conçu et j’en fournis un exemple étonnant.
Certaines pathologies génétiques sont inscrites dans l’ADN mitochondriale de l’ovocyte. Désormais, il est possible d’insérer le noyau d’un ovule dans le cytoplasme d’un autre ovule provenant d’une donneuse pour obtenir un gamète comprenant deux sources de gènes : les uns de l'ADN nucléaire, les autres de l’ADN mitochondrial.
Ainsi, génétiquement, l’enfant aura deux mères, sans parler qu’il pourra être porté par une mère gestatrice qui l’abandonnera, à la naissance, pour le remettre à un couple d’intention.
Voilà de quoi repenser la quête des origines !
Or, ce n’est point de la science fiction, mais des possibilités actuelles.
En pratique, s’agissant de la procréation, les débats devraient porter cette année sur l’ouverture de la Procréation Médicalement Assistée (PMA) aux parents de même sexe, le président y est favorable.
Puis, sur la question de la Gestation Pour Autrui (GPA) qui ne devrait pas être validée, cette fois-ci, le président y étant hostile.
Actuellement, un couple de femmes voulant enfanter doit se rendre à l’étranger, par exemple en Belgique, pour bénéficier d’une PMA, la conjointe de la mère pouvant solliciter l’adoption de l’enfant de sa compagne. Il m’a été donné, au cours de ma vie professionnelle, de prononcer de telles adoptions depuis   l’entrée en vigueur de la loi du 17 mai 2013 ouvrant le mariage aux personnes de même sexe.
Au nom de la liberté du mode de vie de chacun, je suis favorable à cette révision de la loi bioéthique afin d’ouvrir la PMA aux couples de femmes et même aux femmes seules.
Les nostalgiques s’écrieront, comme toujours devant toute innovation : « que faites-vous de l’intérêt de l’enfant » ?
Objection inconsistante puisque trop d’enfants conçus à « l’ancienne » possèdent des parents indignes de l’être.
Le mode de conception ne change rien à l’affaire et ne fait ni le bon, ni le mauvais parent.
La PMA pour tous devrait donc être admise en France à l’occasion de la nouvelle loi bioéthique susceptible d’intervenir à l’automne.
L'enfant ne saurait être un objet, un gadget, un caprice et son arrivée au sein d'un foyer doit demeurer un acte d'amour, ce qu'il n'est pas toujours dans une conception à l'ancienne.
Le droit de l'enfant prime le droit à l'enfant, mais ce principe premier est sans incidence sur les modalités de la conception.
La détermination de parents stériles à aimer et élever un enfant n'est pas moins légitime au regard de l'intérêt de l'enfant qu'un accident d'un soir.
Quant à la GPA, la question devra, nonobstant l’évolution majoritairement favorable de l’opinion publique selon le dernier sondage IFOP, attendre encore un peu.
Autorisée dans nombre de pays, elle permet à des couples hétérosexuels dont la femme ne peut pas porter d’enfant ou à des couples masculins de concevoir un enfant d’intention, notamment en Californie ou en Russie.
Depuis un célèbre arrêt de la cour de cassation du 31 mai 1991, puis depuis la loi de 1994, la GPA est interdite en France et contraire à l’ordre public juridique. Cette prohibition posée par les articles 16 – 7 et 16 – 9 du code civil, conduisit les tribunaux français à refuser la transposition sur les registres de l’état civil des actes de naissance des enfants dont les parents d’intention français avaient été faire porter l’enfant par une mère Américaine.
La cour européenne des droits de l’homme condamna la France pour ce refus de transposition par arrêt du 26 juin 2014 contraignant la jurisprudence interne à évoluer.
Ainsi, le 5 juillet dernier, la cour de cassation admit l’adoption simple d’un enfant par le conjoint masculin du père d’un enfant porté par une mère californienne.
Moralité de ces histoires :
Le monde change et très vite sous l’influence des possibilités offertes aux individus par la science médicale.
De quoi donner le tournis à ceux qui ne supportent pas la vitesse !
Quels sont les piliers de notre éthique ?
Respect de la vie et de la liberté de mode de vie de chacun.
Cette direction fondamentale dicte mes propres positions face à toute problématique.
Laissons à chacun la liberté de vivre sa sexualité, ses besoins selon ce que la nature le détermine.
D’un point de vue politique et face à la surpopulation planétaire, les mesures antinatalistes ne doivent pas brimer la liberté individuelle mais s’adresser à la collectivité.
Par exemple, il convient de supprimer les incitations financières à procréer en réduisant les allocations familiales et les avantages fiscaux au-delà du deuxième enfant.
Les aides internationales devraient être subordonnées à des campagnes de maîtrise des naissances.
L’approche écologiquement responsable s’avère compatible avec le strict respect de la liberté individuelle sans laquelle disparaissent la dignité et le bien-être.

Gérard Charollois

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